La tardiveté de la déclaration de sinistre faite par l’assuré peut fonder un refus de garantie de l’assureur dommages-ouvrage lorsqu’il est relevé que le manquement du premier à son obligation de diligence a eu pour effet de priver le second de la possibilité d’exercer un recours subrogatoire contre les constructeurs responsables et leurs assureurs (Cass. civ., 3ème, 8 février 2018, n°17-10010)
19 mars 2018
Le legs par un associé d’un bien dépendant de l’actif social est nul (Cass. civ. 1ère, 15 mai 2018, n°14-11.123)
18 septembre 2018
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La représentation successorale prévue au bénéfice des collatéraux privilégiés suppose l’existence d’une pluralité de souches. Le droit de poursuite du créancier contre les ayants droit d’un cohéritier décédé, quand bien même l’obligation est solidaire, est limité au prorata des droits qu’ils recueillent dans la succession (Cass. civ. 1ère, 14 mars 2018, n°17-14583)

Le mécanisme de la représentation successorale : un régime d’exception soumis à de strictes conditions.

 

La représentation est un mécanisme successoral, qui déroge à la règle selon laquelle toute personne appelée à une succession et qui n’en est pas exclue (soit par une cause d’indignité successorale ou par une renonciation volontaire) est appelée à succéder de son propre chef.

Aux termes de l’article 751 du Code civil, la représentation est « une fiction juridique  qui a pour effet d’appeler à la succession les représentants aux droits du représenté ».

 

Les deux ordres concernés par le mécanisme de la représentation.

 

En vertu de cette fiction juridique, un successible appartenant soit à l’ordre des descendants (article 752 du Code civil)  soit à l’ordre des collatéraux privilégiés (article 752-2 du Code civil) qui devait être appelé à la succession du défunt mais qui ne peut y venir – en raison de son prédécès, de son indignité ou d’une renonciation – peut être représenté par l’un de ses descendants (enfant, petit-enfant, arrière petit-enfant…).

Cette représentation peut (en théorie) jouer à l’infini dans la ligne directe descendante.

Cette possibilité de succéder par représentation est fondée sur l’existence d’un lien de filiation avec le représenté et non sur une relation successorale.

Ainsi, la personne qui entend venir à une succession par représentation de son auteur prédécédé n’a pas à justifier de droits dans la succession de ce dernier à partir du moment où il existe un lien de filiation avec la personne qu’il entend représenter. Ceci permet d’expliquer qu’une personne ayant renoncé à la succession du défunt, puisse valablement être représenté par l’un de ses descendants.

Pour autant, le représentant doit avoir une aptitude personnelle à recueillir la succession du de cujus : il ne doit donc pas être indigne à son égard.

 

L’existence d’une pluralité de souches.

 

Une autre condition essentielle pour que la représentation puisse jouer est l’existence d’une pluralité de souches.

Le de cujus qui laisse à sa succession un seul enfant (ordre des descendants) ou un seul frère ou encore une seule sœur (ordre des collatéraux privilégiés) ne peut donner lieu à l’application de la représentation successorale. En pareil cas, les petits-enfants ou petits-neveux/nièces viennent à la succession de leur chef et non par représentation.

Un arrêt de la Cour de cassation rendu le 25 septembre 2013 était déjà venu rappeler qu’est exclu toute représentation successorale dès lors que le de cujus n’a eu qu’un seul enfant (Cass. civ. 1ère, 25 septembre 2013, n°12-17556, Bulletin 2013, I, n°192)

 La même solution est ici retenue lorsque le défunt laisse à sa succession un frère ou encore une sœur.

En l’espèce, le de cujus avait, en l’absence de descendants, laissé à sa succession les deux enfants de sa sœur prédécédée. L’un des deux enfants est décédé, laissant lui-même à sa succession son épouse et ses deux enfants.

Le conjoint survivant contestait deux avis de mise en recouvrement de l’administration fiscale qui avait retenu le tarif applicable au neveu ou nièce (55% jusqu’au 4ème degré inclus) et non le tarif prévu entre frère et sœur (actuellement 35% puis 45% si l’assiette taxable est supérieure à 24.430 €).

 

La solution rendue par la Cour de cassation.

 

Sans surprise, la Cour de cassation confirme les juges d’appel qui avaient rejeté ici de faire jouer la représentation. Les hauts magistrats rappellent sans équivoque « qu’il résulte de l’article 752-2 du code civil qu’il ne peut y avoir représentation, en ligne collatérale, en présence d’une seule souche ».

Ayant constaté que le défunt n’avait laissé pour lui succéder que les deux enfants de son unique sœur, aucune représentation ne pouvait ici être invoquée. Conséquence fiscale, les deux héritiers de la sœur – prédécédée – ne pouvaient aucunement profiter du tarif fiscal préférentiel (mais encore de l’abattement) dont aurait pu bénéficier leur auteur s’il était effectivement venu à la succession du de cujus.

 

Le droit de poursuite de l’administration fiscale contre les ayants droit du débiteur décédé limité à la vocation successorale.  

 

L’autre intérêt de l’arrêt consistait à savoir quel était le droit de poursuite que pouvait invoquer l’administration fiscale, en sa qualité de créancier successoral, à l’égard des ayants droit du cohéritier décédé (et venant de son chef à la succession du défunt).

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel qui avait jugé que le conjoint survivant, ayant droit dans la succession de son mari, étaient tenu de payer la moitié des droits de succession dus par ce dernier en application de l’article 1709 du Code général des impôts et de l’ancien article 1220 du Code civil (devenu article 1309 du Code civil depuis la réforme du droit des contrats).

 

De la distinction entre obligation solidaire et obligation divisible.

 

En réalité, la solution erronée rendue par la Cour d’appel procédait d’une confusion entre obligation solidaire et obligation divisible : Quand bien même le Code général des impôts prévoit en son article 1709 une solidarité entre les héritiers pour le paiement des droits de mutation par décès, il n’empêche que cette dette fiscale est divisible.

Dès lors, la Cour de cassation précise justement que le conjoint survivant « ne pouvait être poursuivi qu’au prorata de ses droits dans la succession de son époux ». Ainsi, le conjoint survivant, qui venait à la succession de son mari avec ses deux enfants, ne pouvait donc être recherché qu’à hauteur de sa vocation dans la succession de son époux décédé.

 

Réfs. : Cass. civ. 1ère, 14 mars 2018, n°17-14583, à paraître au Bulletin.