L’action en responsabilité pour la réparation de dommages affectant l’ouvrage débute, dans la très grande majorité des cas, par la désignation d’un expert judiciaire devant le juge des référés.
Comme toute action en justice, l’assignation en référé interrompt la prescription de l’action en responsabilité jusqu’au prononcé de l’ordonnance (article 2246 du code civil). A compter de cette date, un nouveau délai de prescription recommence donc à courir.
En droit de la construction, l’assignation en référé doit également, pour produire pleinement son effet interruptif de prescription, décrire les désordres invoqués.
L’on sait que, pour les immeubles soumis au statut de la copropriété, le syndicat des copropriétaires est, en principe, seul recevable à agir en justice pour la réparation des désordres touchant aux parties communes ou affectant l’immeuble.
Le syndic de la copropriété, qui représente le syndicat des copropriétaires, doit en principe être habilité par l’assemblée générale des copropriétaires afin d’exercer toute action en justice, sauf dans le cadre d’une procédure initiée devant le juge des référés. (article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967)
Classiquement, l’assignation en justice est donc introduite au nom du syndicat des copropriétaires, lequel est représenté par son syndic en exercice.
Toutefois, dans la présente affaire, la situation se présentait sous un angle légèrement différent.
En l’espèce, la Cour d’appel s’était retrouvée dans une situation singulière dans la mesure où l’acte introductif d’instance permettant d’obtenir, la désignation en référé d’un expert judiciaire, faisait seulement état d’une procédure initiée au nom du ‘syndic agissant au nom des copropriétaires de l’immeuble’, aucune référence précise au syndicat des copropriétaires n’apparaissant formellement dans l’acte, pas plus que dans le cadre des opérations d’expertise.
La Cour d’appel avait donc tiré la conclusion que l’action en responsabilité lancée ultérieurement au fond, cette fois-ci au nom du syndicat des copropriétaires, était prescrite du fait que l’instance en référé n’avait pu valablement produire son effet interruptif de prescription, considérant que le syndicat des copropriétaires n’avait jamais été demanderesse à l’instance en référé.
Elle avait également constaté que l’assignation en référé ne décrivait pas les désordres.
La Cour de cassation ne retient pas l’analyse des juges du fond et adopte ici une position beaucoup plus souple.
La Haute juridiction casse sèchement l’arrêt d’appel en précisant d’une part que « le syndic n’avait pas agi à titre personnel mais au nom des copropriétaires constitués en un syndicat » et, d’autre part que, l’assignation « décrivait les désordres invoqués ».
La Cour de cassation rappelle, dans cet arrêt, que l’imprécision d’ordre formel de l’acte introductif d’instance produit tout de même son effet interruptif lorsqu’il n’existe aucun doute sur le fait que l’action était effectivement exercée au nom et dans les intérêts du syndicat des copropriétaires, la formulation employée dans l’assignation ne permettant pas de venir de soutenir que l’assignation avait été lancée au nom syndic à titre personnel.
Cet arrêt censure également les juges du fond quant à l’appréciation faite sur la description des désordres dans l’acte introductif d’instance.
La Cour exerce donc ici un contrôle attentif de l’assignation en référé.
Référence : Cour de cassation, 3ème chambre civile, 16 septembre 2015, n°14-16.705