Tout comme en droit commun de la vente immobilière et les ventes d’immeubles à construire (cf. article 1619 du Code civil et Cass. 3ème, 24 novembre 1999), l’acquéreur d’un ou plusieurs lots de copropriété doit réagir très rapidement s’il entend obtenir en justice une diminution du prix de vente en raison d’une différence de surface supérieure à un vingtième (5%) par rapport à celle exprimée dans l’acte de vente.
En effet, l’article 46 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis dispose in fine que « Si la superficie est inférieure de plus d’un vingtième à celle exprimée dans l’acte, le vendeur, à la demande de l’acquéreur, supporte une diminution du prix proportionnelle à la moindre mesure.
L’action en diminution du prix doit être intentée par l’acquéreur dans un délai d’un an à compter de l’acte authentique constatant la réalisation de la vente, à peine de déchéance. »
Très souvent, pour démontrer une différence de superficie supérieure à un vingtième, l’acquéreur sollicite la désignation en justice d’un expert judiciaire ayant pour mission d’établir un mesurage précis des lots, dans le but d’obtenir un rapport d’expertise judiciaire, au contradictoire du vendeur.
A ce stade, il n’est en toute logique formulé aucune demande de condamnation financière à l’encontre du vendeur puisque l’acquéreur n’est encore pas en mesure d’apprécier exactement la différence de surface.
Selon l’article 2241 du Code civil, une demande en justice – souvent formalisée par une assignation délivré par huissier de justice -, même en référé interrompt le délai de prescription ou encore le délai de forclusion.
Cette interruption n’a lieu que jusqu’à ce que la décision de justice soit rendue, à savoir ici, jusqu’au prononcé de l’ordonnance de référé.
A compter de cette décision de justice, une nouvelle prescription recommence à courir.
En l’espèce, un acquéreur avait acheté divers lots de copropriété suivant acte authentique de vente en date du 20 mars 2007.
L’acquéreur soupçonnant une erreur sur les surfaces réellement vendues, ce dernier avait, par assignation du 28 juin 2007, demandé en justice la désignation d’un expert judiciaire ayant pour mission d’établir la surface de l’ensemble des lots qui lui avait été vendus.
Une ordonnance de référé du 10 octobre 2007 lui avait donné satisfaction et le Président du Tribunal avait désigné un expert judiciaire.
Probablement suite au dépôt du rapport d’expertise, l’acquéreur assignait, par acte du 17 septembre 2008, le vendeur d’une action en diminution du prix devant le Juge du fond.
La Cour d’appel de Paris, par un arrêt du 3 avril 2014, déclarait l’action de l’acquéreur irrecevable sur le fondement de la prescription, un délai de plus d’un an s’étant écoulé entre le jour de la réitération de la vente par acte authentique et le jour de l’assignation, précisant que l’assignation en référé délivrée le 28 juin 2007, dont le dispositif tendait à la désignation d’un expert au visa des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile n’avait pas eu pour effet d’interrompre ou de suspendre le délai prévu par les dispositions susvisées.
Cette décision est sèchement cassée par la Cour de cassation.
La Haute Cour considère justement que l’assignation en référé expertise, alors même qu’elle ne contient pas de demande de condamnation financière, est de nature à interrompre la courte prescription d’un an édictée par l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965.
L’on ne peut ici que partager la décision rendue le 12 novembre 2015, pour ne pas vider de sa substance l’action en diminution du prix ouverte par l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965, lorsqu’il est préalablement nécessaire d’obtenir un rapport d’expertise permettant de vérifier s’il existe ou non une différence de surface supérieure à 5% permettant par la suite d’engager une action au fond.
Références : Cour de cassation, 3ème chambre civile, 12 novembre 2015, n° 14-18.390 (Bulletin)